Entretien avec Mohamed Karrat, réalisateur
ALM : Vous préparez un nouveau film cinématographique. Que pouvez-vous nous dire à ce propos ?
Pourquoi une barbe ?
En général, les avocats n’ont pas de barbe. Et
si j’ai demandé à Rachid El Ouali de garder celle-ci, c’est pour faire
valoir ma vision. A mon sens, cette star, qui joue d’habitude sans
barbe, a mûri et je voulais la voir dans un autre personnage qu’elle n’a
jamais joué. D’autant plus que Rachid El Ouali est un grand acteur qui
me facilite la tâche. Quand j’écrivais le scénario, je savais que le
personnage d’avocat était fait pour lui. Je suis heureux qu’il ait
accepté ma proposition. C’est un ami. Et je sais qu’il constituera un
avantage pour mon film intitulé provisoirement «Petits rêves».
Qu’est-ce qui vous a inspiré l’idée de ce film ?
C’est
une histoire que j’ai vécue personnellement et développé pour rester
dans la fiction. D’ailleurs, le déclenchement du scénario tient de la
réalité puisque j’avais visité une association de personnes en situation
de handicap où j’ai trouvé qu’elles avaient des problèmes. Je suis
entré en contact avec des avocats et des conseils juridiques pour
concevoir l’intrigue du film. J’espère qu’il sera apprécié par les
Marocains.
Comment vous démarquez-vous par rapport à d’autres réalisateurs qui ont traité le même sujet ?
Mon
film traite différemment la situation des personnes en situation de
handicap. C’est un traitement plus profond que les choses visuelles. Je
ne veux pas que ces personnes soient vues à travers la maladie mais avec
les yeux. D’ailleurs le titre choisi pourra changer par « Regardez-moi
dans les yeux ». Et c’est complètement différent quand on regarde ces
personnes dans les yeux.
Vous prenez pas mal de temps pour sortir un nouveau film…
Vous
savez, le nouveau film m’a pris une année pour l’écrire. Je pense que
c’est le temps nécessaire. Pour ce film, c’est la partie juridique qui
m’a pris beaucoup plus de temps et c’est normal !
Avec ce nouveau film, vous changez carrément vos sujets romantiques habituels. N’est-ce pas ?
Tout
à fait ! D’habitude, je fais des films de comédie romantique. Alors que
mon nouveau film est une histoire dramatique. Le drame est un nouveau
registre pour moi. Je l’ai fait parce que j’aime bien le défi. Quand
même, je trouve que le drame est aussi difficile que la comédie. C’est
pour cela que je voulais m’essayer, voire m’expérimenter dans ce genre
de films et par là avoir un plus pour le cinéma marocain.
Quel regard portez-vous sur le cinéma marocain ?
Il
est en évolution permanente et éminente. On voit que les dix dernières
années ont été marquées par l’arrivée de jeunes réalisateurs qui
prennent la relève. Par contre, il y a un problème puisque nos films ne
sont pas vus à l’étranger.
Certes,
les réalisateurs doivent fournir des efforts mais il faut aussi et
surtout que le Centre cinématographique, entre autres, en fasse, pour
que nos films soient dans les festivals étrangers. D’autant plus que
nous ne trouvons pas de salles de cinéma où projeter nos films. C’est
comme si nous produisions des films pour les jeter. Et quand on voit le
box-office, on trouve que les films marocains y sont classés numéro 1. A
mon sens, le domaine cinématographique n’est pas bien exploité et c’est
malheureux !
Alors comment contribuer au rayonnement des films marocains à l’étranger ?
Les
films marocains qui ont fait carrière à l’étranger sont très peu
nombreux. Ils n’ont jamais eu la chance d’avoir des oscars. Je trouve
qu’il n’y a pas de volonté de la part de la tutelle pour mettre le film
marocain en avant. Or, d’autres pays, qui n’ont pas les moyens, font
beaucoup d’efforts pour promouvoir leurs films. Par exemple, le fait
qu’il n’y ait pas eu de film marocain au FIFM c’est grave et c’est à la
fois une honte pour le cinéma marocain. C’est comme si nous n’étions pas
capables de produire un film. Ce n’est pas une bonne chose pour notre
image ! Le FIFM est aussi fait pour les Marocains qui aiment leurs
artistes. J’espère qu’on va se rattraper lors des prochaines éditions.